Le décret du 23 novembre 2021 n°2021-1516, entré en vigueur le 1er février 2022, vient préciser les modalités d’application de certaines dispositions du Code Pénal et du Code de Procédure Pénale relatives aux personnes, mineures ou majeures, victimes d’infractions commises au sein du couple ou de la famille afin de renforcer l’effectivité de leurs droits et leur protection.
Violences conjugales en présence d’un mineur.
Ce décret crée un nouvel article D.1-11-1 dans le Code de Procédure Pénale qui prévoit qu’en cas de violence conjugale, le Procureur de la République doit vérifier si ces violences ont été commises en présence d’un(e) mineur(e).
Cette précision permet au mineur d’être considéré comme victime (alors même qu’il n’est pas victime « directe » mais qu’il était « présent ») et non plus comme témoin, et lui permet de se constituer partie civile, le cas échéant, en étant représenté par un administrateur ad hoc en application des articles 706-50 et 706-51 du Code de Procédure Pénale.
Le décret ajoute que la Juridiction seulement saisie de fait de violence conjugale sans circonstance aggravante peut requalifier les faits en ce sens.
En réalité, une requalification des faits impose de n’ajouter aucun faits ou de ne pas substituer des faits distincts à ceux de la prévention sauf si le prévenu donne son accord express d’être jugé sur des faits ou circonstances aggravantes non compris dans la prévention (arrêt de la chambre criminelle du 22 novembre 1994 n°94-80.387).
Enfin, le décret ajoute que la Juridiction de Jugement ayant à apprécier le préjudice subi par le mineur peut se prononcer, en application des dispositions du Code Pénal et du Code Civil, sur le retrait total ou partiel de l’autorité parentale ou de son exercice ou ainsi que sur la suspension des droits de visite et d’hébergement et peut verser au dossier des pièces émanant de procédures suivies devant le Juge aux Affaires Familiales ou le Juge des Enfants, et ordonner un examen ou une expertise psychologique du mineur.
Remise d’une copie du certificat médical.
L’article D1-12 de Procédure Pénale précise les modalités pour la victime de se voir remettre une copie du certificat d’examen médical constatant son état de santé physique ou psychologique et décrivant les éventuelles lésions qu’elle a subies lorsque l’examen a été requis par un officier ou agent de police judiciaire, un magistrat ou une juridiction.
Le décret ajoute un VII à cet article : si l’examen concerne un(e) mineur(e), le Médecin n’est pas obligé de remettre une copie du certificat à ses représentants légaux, même s’ils en font la demande, s’il estime que cette remise pourrait être contraire à l’intérêt supérieur de l’enfant notamment en cas de suspicion de violences intrafamiliales, ou si le/la mineur(e) disposant d’un degré de maturité suffisant le refuse.
Délit de non-représentation d’enfant.
Un nouvel article D. 47-11-3 est inséré dans le Code de Procédure Pénale qui prévoit que lorsqu’une personne mise en cause pour non-représentation d’enfant soutient que les faits qui lui sont reprochés ont été justifiés par des violences ou toutes autres infractions relevant de l’article 706-47 du Code de procédure pénale (infractions de nature sexuelle et certains crimes commis à l’encontre de mineur(e)s) commises par la personne qui a le droit de réclamer l’enfant, le Procureur de la République veille à ce que ces allégations soient vérifiées avant de décider de mettre, ou non, en mouvement l’action publique.
Dans l’hypothèse d’une citation directe du prévenu devant le Tribunal Correctionnel, le Procureur de la République doit s’assurer que le Tribunal dispose des éléments lui permettant d’apprécier la réalité de ces violences et l’application éventuelle des dispositions relatives à l’état de nécessité.
Extension de la Justice restaurative.
La notion de justice restaurative est définie à l’article 10-1 du Code Pénal : « Constitue une mesure de justice restaurative toute mesure permettant à une victime ainsi qu’à l’auteur d’une infraction de participer activement à la résolution des difficultés résultant de l’infraction, et notamment à la réparation des préjudices de toute nature résultant de sa commission ». La Justice restaurative implique l’existence d’une procédure pénale et la reconnaissance des faits par leur auteur.
Le décret du 23 novembre 2021 a ajouté deux alinéas à l’article D. 1-1-1 du Code de procédure pénale :
- les mesures de justice restaurative peuvent être mises en œuvre y compris si la prescription de l’action publique est acquise;
- le Procureur de la République vérifie si une mesure de justice restaurative est possible lorsqu’un classement sans suite, un non-lieu, une relaxe ou un acquittement sont intervenus en raison de la prescription de l’action publique en cas d’infractions sexuelles commises par un majeur sur un mineur et reconnues par leur auteur.
Agrément des associations d’aide aux victimes.
Le décret du 23 novembre 2021 vient compléter l’article D1-12-1 relatif aux associations agrées d’aide aux victimes en distinguant :
- les agréments de compétence générale lorsqu’il concerne toutes les infractions
- les agréments de compétence spécialisée lorsqu’il ne s’applique qu’aux violences au sein du couple et aux violences sexuelles et sexistes